100 ans de cinéma japonais (3ème partie)
Du 14 février au 18 mars 2019
Nouvelles trajectoires
Enterrée un peu trop prématurément, la vitalité du cinéma japonais ne s'est pourtant jamais véritablement démentie pour celui qui aurait la curiosité de s'y pencher attentivement. Il y a quarante ans déjà, certains spécialistes hexagonaux, rétifs à voir changer une cinématographie pour laquelle l'appropriation des codes culturels fut longue, ont pointé du doigt le délitement inexorable des studios japonais. Ces discours alarmants, révélant davantage une défaillance profonde de l'appareil critique qu'un vrai état des lieux de la production nipponne, n'ont ainsi pas permis d'identifier les nouveaux auteurs des années 1970 et 1980. Si la décennie suivante a tenté de rectifier le tir, cela n'a malheureusement pas donné un résultat suffisamment durable pour que des cinéastes comme Makoto Shinozaki, Shinji Aoyama, Ryosuke Hashiguchi et même Takeshi Kitano trouvent encore le chemin de nos salles aujourd'hui.
Alors pour quelles raisons cette baisse de fréquentation et de qualité significative, phénomène observable dans toutes les principales cinématographies du monde, paraît-elle si irrémédiable pour le pays du Soleil Levant ? Statistiquement parlant, il se porte pourtant plutôt bien : totalisant 228,57 milliards de yen de recettes en 2017, soit une augmentation de presque 3% par rapport à l'année précédente, la production domestique a ainsi ramené les blockbusters américains à la deuxième place du podium. Mais les chiffres ne permettent bien sûr pas de tracer les contours d'un cinéma qui nous parle au présent alors que l'on s'efforce encore aujourd'hui de le conjuguer au passé.
Cette troisième et dernière partie dévoilera une constellation de nouveaux noms et problématiques avançant en ordre dispersé : vengeance absurde contre l'État trouvant sa symétrie dans des tournois de sumo féminin (The Chrysanthemum and the Guillotine de Takahisa Zeze) ; récit d'une révolution par ses figures oubliées (Ernesto de Junji Sakamoto) ; destinées de trois personnages heurtés par la société (Three Stories of Love de Ryosuke Hashiguchi) ; décrochage sentimental par le biais des réseaux sociaux (A Bride for Van Winkle de Shunji Iwai)... Ou encore méditation surréaliste sur l'absurdité de la guerre (Hanagatami du vétéran Nobuhiko Obayashi). Ne négligeant pas non plus le film de genre avec le yakuza eiga (The Blood of Wolves) et même le kaiju eiga (Godzilla Resurgence), cette rétrospective Japonismes se clôt sur un panorama partiel, mais nécessaire et exaltant, du nouveau cinéma japonais.
Clément Rauger