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« Votre adaptation est trop fidèle à la nouvelle de Philip K. Dick. Ce dont je rêve, moi, c'est des Aventuriers de l'arche perdue sur Mars. » Quand, en 1988, Dino de Laurentiis écarte David Cronenberg, initialement pressenti pour adapter Souvenirs à vendre au cinéma, l'idée semble destinée à rejoindre le cimetière des projets avortés du célèbre mogul italien. De Laurentiis sait certes où il veut aller, mais il ne sait pas trop avec qui... C'est Arnold Schwarzenegger qui va ressusciter Total Recall quelques mois plus tard, en rachetant les droits du scénario, en imposant aux studios le nom de Paul Verhoeven (l'acteur racontera avoir été très impressionné par Robocop) et en appliquant au script les recettes de son succès. De fait, le film ne ressemble pas tant aux Aventuriers de l'arche perdue qu'à un croisement de Commando, Predator et The Running Man − soit ce mélange explosif d'action, d'humour et de punchlines qui faisait alors de Schwarzenegger l'un des rois du box-office.
Pour autant, Total Recall reste un film singulier dans la carrière de l'acteur autrichien. Alors que Schwarzenegger entame un virage grand public, Verhoeven l'embarque une dernière fois dans un grand huit violent (furieuse scène de poursuite inaugurale, inimaginable dans un blockbuster d'aujourd'hui), sexuel et égrillard. Pervertissant comme à son habitude les projets qui lui sont confiés, le Hollandais violent fait du plus gros budget de l'année une série B bâtarde, mix singulier d'effets spéciaux éblouissants (signés du génial Rob Bottin) et de carton-pâte dans lequel il plonge un Schwarzy complètement dépassé. « Si je ne suis pas moi, alors qui suis-je ? » s'interroge à un moment, hébété, le héros de ce film-monstre. On ne sort jamais vraiment indemne des labyrinthes cérébraux de Philip K. Dick. A fortiori quand ils sont mis en scène par Paul Verhoeven.
Xavier Jamet